Des réponses locales, pas des boucs émissaires
Ne bradons pas nos fondamentaux humanistes. Ecopop ne résout pas les problèmes que les initiants instrumentalisent. Des vraies réponses existent, ayons le courage de les mettre en place, sans boucs émissaires.
Neuchâtel a tout à perdre d’Ecopop : il est aujourd’hui un des cantons où la croissance de la population est parmi les plus faibles en Suisse, avec tous les problèmes que cela suppose : rapport de dépendance entre actifs et personnes âgées qui se dégrade, avec des coûts sociaux - par exemple les prestations complémentaires, ou le financement des EMS - en augmentation, et de moins en moins d’actifs pour en payer les coûts. Economiquement, la difficulté à trouver des employés qualifiés et par là-même la difficulté à attirer des entreprises va aller en s’amplifiant. L’initiative ne différencie en effet pas les régions en Suisse. Si la pression de l’immigration est plus élevée dans les grands centres urbains, c’est en dehors de ceux-ci, comme à Neuchâtel, que les conséquences de l’initiative seront les plus pénibles.
Le problème du mitage du territoire ne sera pas résolu par Ecopop. Au cours des dernières décennies, avec l’augmentation de la population, ce sont surtout nos habitudes qui ont changé. En 30 ans, la surface de la Ville de La Chaux-de-Fonds a crû de 30%, et sa population a diminué de 5000 habitants, plus de 10%. La réponse au mitage du territoire et à la perte de terres agricoles et surfaces naturelles passent par des contraintes en matière d’aménagement du territoire : densification, diminution des zones à bâtir, etc. Des solutions qui ont été acceptées récemment par le peuple neuchâtelois dans le cadre de la révision de la Loi fédérale sur l’aménagement du territoire. Ajoutons encore que la libre circulation n’a pas eu d’effet sur la construction de maisons individuelles. Un nombre semblable a été enregistré entre 1993 et 2002 et entre 2003 et 2012 au niveau suisse.
Les problèmes de mobilité ne seront pas résolus par Ecopop. Une fois encore, ce sont nos habitudes qui ont changé au cours des dernières décennies. Du côté des tranports individuels, la distance parcourue a crû de +10% entre 2000 et 2010. Au niveau des transports publics, par exemple le rail, l’accroissement du nombre de passagers est de 33% entre 2000 et 2012, pour une augmentation de la population de seulement 12%. Ce sont nos habitudes qu’il faut changer, en améliorant la compétitivité des transports publics, et en réflechissant à des alternatives à notre mobilité débridée, par exemple en rapprochant les lieux de travail des habitations pour réduire la pendularité ou en fixant un moratoire à l’extension des infrastructures de transport. Les initiants ont de plus oublié le volet des frontaliers. La limitation de l’immigration risque donc bien d’accorître encore leur nombre, avec les nuisances qui vont avec.
La Suisse est une terre d’immigration. Un auditeur a lancé un défi cet été à un journaliste de la RTS : trouver un genevois dont les huit grands-parents sont genevois. La tâche a été très difficile à Genève, elle le sera autant à Neuchâtel, qui a toujours été une terre historique d’immigration, depuis l’étranger et depuis d’autres cantons. Ne bradons pas nos fondamentaux humanistes. Ecopop ne résout pas les problèmes que les initiants instrumentalisent. Des vraies réponses existent, ayons le courage de les mettre en place, sans boucs émissaires. Il vous reste deux semaines pour dire NON à Ecopop.