Budget 2010 de l'Etat. Intervention
Voici l'intervention concernant le budget 2010 de l'Etat. Peut-être que pour certains, il permettra de remettre les pendules à l'heure, tant les propos de la presse déforme finalement ce que nous avons réellement dit au début du mois de décembre.
Madame la Présidente, mesdames, messieurs,
La crise économique que nous traversons aujourd'hui est grave. Elle touche durement la population, à travers le recours au chômage ou à l'aide sociale, et plus largement à travers une incertitude face à l'avenir pour l'ensemble des habitants de notre canton. Pour les finances de l'Etat, cette situation entraîne plusieurs choses. D'abord la dégradation des rentrées fiscales que le Conseil d'Etat a estimé en diminution de plus de 51 millions en comparaison du budget 2009, et ceci rien que sur les personnes morales (une dégringolade de - 43%). L'explosion des charges d'aide matérielle présente l'autre facette du problème conjoncturelle que nous traversons. Elles augmenteront d'un peu moins de 20 millions par rapport au budget 2009. Ensemble, ces deux mesures péjorent déjà le budget de plus de 70 millions, à quoi nous pouvons encore ajouter les autres dépenses d'intensité qui sont en forte augmentation. Si on y ajoute les reports de charges de la Confédération, on atteint le fond.
Les mécanismes de freins nous empêchent pourtant de « laisser passer l'orage » à moins bien sûr que le Conseil d'Etat ou le Grand Conseil en décide autrement. Une décision courageuse, que le Conseil d'Etat n'a pas voulu prendre en 2010-2011 et qu'il a préféré reporter à 2011-2012 ou laisser le soin au Grand Conseil de prendre la décision à sa place. L'argument utilisé est que la situation sera alors « pire » qu'elle n'est aujourd'hui. Nous n'entrerons pas le sur le terrain des indicateurs économiques, mais userons d'une argument pragmatique. Quel que soit la situation en 2012, les réformes structurelles qu'aurait permis la suspension des freins auraient à notre avis été bénéfiques au canton, parce que contrairement à ce qui nous est proposé aujourd'hui, elles auraient pu être inscrites dans un processus, en dialoguant avec les partenaires de l'Etat (nous y reviendrons) et auraient sans doute permis de faire face dès 2012. Ce choix, le Conseil d'Etat ne l'a pas fait. Il a préféré réformer dans l'urgence et la précipitation, en prenant le risque du chaos budgétaire que nous allons vivre durant deux jours.
Cela étant dit, le groupe POPVertsSol aimerait exprimer ici une profonde inquiétude quant à l'avenir de notre canton. Du point de vue éthique, ce budget n'est aujourd'hui pas acceptable. L'éthique nous indique – ou nous enseigne – comment nous devrions nous comporter, en tant qu'être humain, envers nous-mêmes en tant que groupe ou société, et envers ce qui nous entoure. Le budget que l'on nous demande aujourd'hui d'accepter ne tient pas compte des cet enseignement. Il érige la confrontation en utilité et abandonne toute volonté de dialogue au profit d'une lutte sans merci pour savoir qui a raison et qui a tort. Une guerre qu'on peut encore imaginer dans une cour d'école mais qui est impensable à l'échelle d'une collectivité publique.
Plusieurs exemples nous sautent immédiatement aux yeux. Exemple 1. Le dialogue entre le canton et ses communes passe semble-t-il plus facilement par le tribunal fédéral que par les canaux ordinaires. C'est une situation regrettable car elle sera sans doute aujourd'hui à l'origine d'une acceptation ou non de ce budget et qu'à notre avis, ses questions auraient dues être réglées à un autre moment de l'année, dans une situation plus calme. Et dans la concertation, car encore aurait-il fallu que les partenaires se mettent autour de la même table et discutent de leur avenir commun. Cette situation de blocage dessert l'ensemble du canton et de sa population, nous ne pouvons que le regretter. Exemple 2. Le dialogue avec le personnel n'a simplement pas eu lieu cette année, alors que c'est sans doute dans les moments les plus difficiles qu'il est le plus important. Mais le Conseil d'Etat n'en a pas voulu, il a d'emblée affirmer sa volonté de ne pas négocier ce qu'il a lui-même qualifié de non-négociable. Exemple 3. Le dialogue avec le Grand Conseil. La nouvelle cohabitation que nous vivons aurait dû nous pousser à mettre nos forces en commun. Le Conseil d'Etat n'en a pas voulu, il a préféré imposer sa vision et nous laisser ensuite le soin de nous étriper. Une fois de plus, ce que nous allons vivre aujourd'hui n'est pas étranger à cette incapacité à dialoguer et à la volonté de diviser. Notre groupe a très amèrement ressenti la volonté affichée par le Conseil d'Etat de forcer la main au Grand Conseil en proposant qu'en cas de refus du budget, il travaillerait quand même sur la base de « son » budget 2010. C'est à se demander à quoi nous servons. Exemple 4 : les autres partenaires de l'état, prestataires d'une partie des services importants à la population. En réduisant la plupart des subventions linéairement de 10%, et ceci sans donner de directives claires quand aux prestations qui devraient ou pourraient être coupées, le Conseil d'Etat élude sa responsabilité et transfert à d'autres les problèmes éthiques, mais aussi politiques qu'engendrent toute diminution des prestations. Les coupes dans le domaine des institutions spécialisées sont à cet égard le meilleur exemple.
Pour toutes ces raisons, notre groupe est de mauvaise humeur, de très mauvaise humeur. Les amendements qui ont été proposés en CGF ou que nous avons amenés permettent certes d'améliorer un peu ce budget, mais ils ne permettront sans doute pas à l'ensemble du groupe de l'accepter (parce que pour certains, la pléthore d'amendements proposés fait du budget un budget d'épicerie). Pour beaucoup, ce budget est un exercice de démantèlement de l'Etat, qui donne une image catastrophique de nos institutions. Notre groupe a fixé une règle qui tient toujours : aucune des mesures ne doit être pérenne, la situation est avant tout conjoncturelle et nous attendons un véritable plan de réformes, basé sur un vision du canton que nous pouvons accepter. Mais aujourd'hui, hormis une vision économique, nous ne voyons malheureusement rien. Les coupes ont lieu dans les domaines essentiels de l'Etat, dans la formation, la santé, l'aide aux éléments les plus fragiles. Ceci, personne ne peut l'accepter.
Nous regrettons finalement que le Conseil d'Etat n'ait pas réfléchis à la question des recettes et nous laisse le soin de le faire. Les efforts que le canton doit mettre en oeuvre afin de faire face à la crise économique que nous traversons, doivent être portés par tous, en fonction de leur capacité financière.
Pour terminer, le groupe POPVertsSol aimerait encore remercier l'ensemble des services de l'administration pour leur travail (une pensée particulière va à Mesdames Gauthier et Pug qui ont dû subir les humeurs de la commission de gestion et finances, parfois même le dimanche soir).
Je vous remercie

