La cohabitation à la neuchâteloise : scènes de ménage
Mise à jour (4 février 2010) : Les récents événements sur Hôpital neuchâtelois (voir plus bas) renforce encore mon opinion : le Conseil d'Etat à majorité absolue PLR ne fait rien pour apaiser les tensions avec le Grand Conseil. Jusqu'où peut-on aller dans la confrontation ?
Depuis les dernières élections cantonales, la vie politique neuchâteloise est rythmée par l’opposition entre un gouvernement de droite et un parlement de gauche, et chaque groupe politique peine à y trouver ses marques. Les choses sérieuses ont commencé en décembre avec le budget. Le Conseil d’Etat est venu avec une proposition inadmissible pour la gauche : faire passer le budget à tout prix dans les limites du frein à l’endettement. Une décision absurde alors même que le canton de Neuchâtel traverse une des pires crises économiques de son histoire, et que les mécanismes de freins prévoient justement des dérogations dans ces conditions. L’entêtement du Conseil d’Etat s’est encore confirmé lorsque la menace d’un refus du budget par la gauche l’a conduit à considérer des mesures de rétorsion à l’encontre de l’ensemble des services et institutions para-publiques en décidant de gérer l’absence de budget en tantièmes du budget… 2010 ! Un affront que personne n’a véritablement gouté au sein du parlement, de gauche comme de droite. La suite de la saga budgétaire montre une des facettes possibles de la cohabitation, à savoir la réunion des forces qu’on pourrait qualifier de centristes – forces qui sont seules représentées au gouvernement – au sein d’une coalition tiraillée entre la compromission et l’envie de plaire à sa base.
Le deuxième acte de cette difficile cohabitation s’est noué en janvier avec le programme de législature et le plan financier qui l’accompagne. Sur ce point aussi, le Conseil d’Etat a voulu imposer sa vision à la majorité du Grand Conseil en proposant des coupes dans les structures de l’Etat pour environ 150 millions de francs à l’horizon 2016. Sans aucune piste pour y parvenir. Sa vision politique s’est arrêtée à la seule dimension financière. Un affront pour la gauche qui a cette fois imposé au Conseil d’Etat une autre manière de voir la cohabitation. Le projet a été sèchement refusé, le Conseil d’Etat devra donc assumer seul son programme de législature pendant les trois prochaines années.
Les prochains mois ne s’annoncent pas moins mouvementés. Le gouvernement présentera en février un programme de redressement des finances cantonales que la gauche amendera pour y enlever le lien que le Conseil d’Etat avait mis avec son programme de législature. Dans le courant de l’année devrait aussi arriver sur la table des députés un texte sur la fiscalité, en particulier des entreprises, un domaine qui, dans le canton de Neuchâtel, provoque à chaque fois de durs combats politiques.
Le Conseil d’Etat doit prendre la mesure de la cohabitation et accepter l’idée que la coalition « centriste » entre le PS et le PLR risque bien de rester une exception au profit d’un affrontement traditionnel entre la gauche et la droite, contrairement d’ailleurs à ce que prédisaient grand nombre de commentateurs suite aux élections cantonales de 2009. Dans cette configuration, le Conseil d’Etat doit impérativement revoir ses propositions pour les rendre plus compatibles avec les idées de la majorité du parlement, sans quoi ce canton n’avancera pas durant ces prochaines années, alors que justement il a besoin de réformer profondément de ses structures.
A paraître dans le prochain bulletin des Verts Romands (si tout va bien...)

